Histoire
Préhistoire, Antiquité pré-romaine et romaine
Les plus anciennes traces de civilisation retrouvées au Portugal datent du Paléolithique : peintures et gravures rupestres des grottes d'Escoural (Alentejo), de Mazouco (Tras-os-Montes) et surtout de Vale de Côa, datées entre 22000 et 10000 av. J.-C. La majorité de ces traces se trouvent au nord du Tage, témoignant de l'existence de peuples de chasseurs-cueilleurs. Vers 10000 av. J.-C., les Ibères peuplent l'intérieur des terres de la péninsule. Ce territoire prend dès lors le nom de « péninsule Ibérique ».
Entre 4000 et 2000 av. J.-C., le Portugal et la Galice voient se développer une culture mégalithique originale par rapport au reste de la péninsule, caractérisée par son architecture funéraire et rituelle particulière, et par la pratique de l'inhumation collective. On peut encore trouver dans le pays de nombreuses traces monumentales, la plupart dans l'Alentejo : le cromlech d'Almendres près d'Évora, ceux de Vale Maria do Meio ou de Portela de Mogos, ainsi que le dolmen de Zambujeiro.
L'âge du bronze voit l'établissement de contacts maritimes entre le littoral atlantique et celui de la Bretagne, et des îles Britanniques alors que le sud de la péninsule entretient des liens commerciaux avec la Méditerranée : des Grecs et des Phéniciens venus de l'actuel Liban, ainsi que leurs descendants carthaginois, y installent de petits comptoirs commerciaux semi-permanents. Le moteur de ce commerce est la richesse de la péninsule en métaux (or, argent, fer et étain), ainsi que le salage du poisson de l'Atlantique, réputé dans le bassin méditerranéen.
Durant l'âge du fer, un peuple indo-européen s'établit dans la région : les Celtes. Ils occupent bientôt le centre et l'ouest de la péninsule, vivant regroupés en petits noyaux de population isolés, établis sur les hauteurs avec des habitations circulaires (castros), et pratiquant l'agriculture et l'élevage. Chaque maison (150 environ) est défendue par une enceinte (comme on peut en voir dans la Citânia de Briteiros). On trouve aussi dans ces regroupements un édifice funéraire. Comme ils maîtrisent le fer, le travail de la terre devient plus efficace, les cueillettes augmentent, améliorant par la même les conditions de vie et la démographie. Les Lusitaniens occupent une partie du territoire actuel du Portugal et les provinces espagnoles du León et l'Estremadure. Ils parlent leur propre langue, et s'étendent peu à peu vers l'Estremadure.
La présence romaine est ancienne et déterminante dans la culture ; les usages et la langue lusitaniens sont fortement latinisés. Le peuplement romain proprement dit commence au Ier siècle av. J.-C. après la conclusion de la paix entre les Lusitaniens et Jules César (en 48 av. J.-C. ). Les Romains créent un réseau urbain et de transport qui structure le pays jusqu'à nos jours. Il est spécialement destiné à l'exportation maritime vers la Méditerranée des principales productions du pays : métaux, huile d'olive, vin, conserves de poisson. L'occupation par les Suèves précédant l'époque wisigothique est partielle et discrète.
Conquête germanique : les Royaumes suève et wisigoth
Au début du Ve siècle, des peuples germaniques, les Suèves, les Vandales (Silinges et Hasdingi) et leurs alliés, les Sarmates et les Alains envahissent la péninsule Ibérique où ils forment un royaume sous la direction du roi suève Herméric.
Le royaume des Suèves est un royaume germanique post-romain établi dans les anciennes provinces romaines de Gallaecia et du Nord de la Lusitanie. Vers 410 et au VIe siècle, il devient un royaume officiel, après qu'Hermeric eut conclu un traité de paix avec les Gallaeci avant de la transmettre à sa mort à Rechila, son fils. Un fœdus concédé par Rome légitime par ailleurs sa fondation. Il est le premier royaume du Haut Moyen Âge qui frappe monnaie pour signifier son existence. En 448 Rechila meurt, laissant le soin de poursuivre l'expansion à Rechiar. Le Royaume suève, qui essaye à plusieurs reprises d'étendre son territoire, conserve son indépendance jusqu'en 585, lorsqu'il est annexé par les Wisigoths, devenant la sixième province du royaume wisigoth d'Hispania.
Depuis sa défaite contre les Francs à la bataille de Vouillé en 507 et la chute de Toulouse en 508, le Royaume wisigoth s'est replié en Hispanie, avec Tolède pour capitale. Après la soumission du Royaume des Suèves et sa capitale Bracara (aujourd'hui Braga) en 584-585, l'ensemble de la péninsule Ibérique est gouvernée par les Wisigoths jusqu'en 711, année de la bataille du Guadalete, véritable tournant dans la conquête du royaume par les troupes musulmanes.
La conquête arabo-musulmane et la période du Gharb Al-Andalus
La conquête musulmane de l'Hispanie par les Omeyyades se fait à partir du Maghreb. Après avoir battu les Wisigoths en 711, les armées arabo-berbères de Tariq ibn Ziyad occupent en trois mois la majeure partie de la péninsule Ibérique (à l'exception d'un réduit chrétien dans le Nord, qui se constitue en royaume des Asturies). L'occupation se fait sous l'autorité de Moussa Ibn Noçaïr, gouverneur omeyyade de l'Ifriqiya et général des troupes musulmanes. Dans la foulée de la conquête de la péninsule et de la Septimanie, les armées musulmanes remontent en 719 vers Narbonne, débarquent en Sicile en 720, puis en Sardaigne, en Corse et dans les Baléares en 724. L'ancienne Lusitanie romaine est alors intégrée dans le vaste empire omeyyade de Damas sous les noms d'al-Tagr al-Adna (en) (Marca Inferior) et de Gharb al-Ândalus. Très vite cependant, des tensions apparaissent entre les chefs berbères, arabes et Damas au sujet du partage du butin des vaincus. Et des particularismes liés à l'histoire spécifique de la région émergent. En 750, la péninsule Ibérique passe sous le joug d'Abd al-Rahman Ier, qui crée et donne son indépendance à l'Émirat de Cordoue, élevé au statut de Califat de Cordoue en 929. À la dissolution du Califat en 1031, l'Hispanie musulmane, qui se fragmente, est partagée entre 23 roitelets indépendants : c'est la période des Reyes de taifas — muluk at tawaif en arabe).
Pris dans des jeux d'alliances et des guerres intestines, les gouverneurs des taïfas se proclament émirs et lient des relations diplomatiques avec les royaumes chrétiens. La plus grande partie de la Lusitanie relève alors de la Taifa de Badajoz des Aftasies, et de la Taifa de Seville des Abbadis. La période des Taifas prend un terme avec l'avancée des Almoravides venus du Maroc en 1086 lors de la Bataille de Sagrajas, puis des Almohades venus également de Marrakech en 1147 à la suite de la Deuxième période de taïfas. Du Xe au XIIIe siècle, les dynasties berbères almoravides et almohades dominent l'ancienne Lusitanie romaine.
D'un point de vue administratif, Al-Andalus est divisé en différents districts nommés Kura. À son apogée, Gharb Al-Andalus est constitué de dix kuras, dont chacune possède une capitale. Les principales villes de l'époque sont Beja, Silves, Alcácer do Sal, Santarém, Lisbonne ou Coimbra. L'occupation musulmane se révèle particulièrement structurante au sud du Mondego, et surtout du Tage, dans les territoires directement sous influence andalouse et rechristianisés tardivement (vers 1249). Silves connaît un rayonnement culturel jusqu'au XIIIe siècle et Mertola joue un rôle économique par les échanges maritimes fluviaux.
La population musulmane de la province est constituée d'Arabes, de Berbères et d'Ibériques convertis de force ou non à l'islam. Issus de prestigieuses familles, les Arabes sont essentiellement originaires du Yémen. Bien que minoritaires, ils constituent l'élite des armées et de l'administration musulmane. On les retrouve notamment dans les villes de Séville, Beja, Huelva jusqu'aux côtes d'Alentejo. Peu nombreux, et regroupés en fonction de leur tribu d'origine, ils forment un groupe solidaire jusqu'au IXe siècle. Les Berbères originaires des montagnes d'Afrique du Nord sont, quant à eux, essentiellement des nomades. Ils constituent la majorité des occupants venus de l'extérieur. D'abord installés dans le nord, ils sont chassés par le roi des Asturies Alphonse Ier et viennent s'installer dans le sud du Gharb, où ils surpassent rapidement en nombre les Arabes. Enfin, les Ibériques convertis à l'islam et nommés muwallads forment le groupe musulman majoritaire.
La situation des chrétiens dépend de la manière dont leur ville s'est rendue aux conquérants arabo-berbères. Lorsqu'elle a capitulé pacifiquement comme à Mérida, Beja ou encore Évora, les nobles wisigoths sont autorisés à conserver leurs terres, si bien que certains documents attestent de la présence de très riches propriétaires terriens wisigoths jusqu'au XIIe siècle et l'Église, elle aussi, peut conserver ses terres. En revanche si, comme à Séville, la ville s'est révoltée face à l'arrivée musulmane, les Arabes divisent les terrains des nobles et les réattribuent à un grand nombre de personnes comme aux serfs, favorisant ainsi les petites propriétés qui caractérise par la suite certaines régions du Portugal. Ces derniers, opprimés durant le règne des rois wisigoths, jouissent d'une certaine indépendance dans l'exploitation de ces terres dans la mesure où leurs nouveaux maîtres ne souhaitent pas pratiquer eux-mêmes l'agriculture et donc laissent leurs subordonnés cultiver comme ils le souhaitaient. La particularité du Gharb est le fait que la noblesse y a toujours été très indépendante, et cela bien avant l'arrivée arabe.
Les nouveaux conquérants, qui comptent plusieurs milliers de personnes (environ 16 000), s'installent d'une façon générale au sud du Mondego, et surtout du Tage, en particulier dans la région de l'Algarve. La période d'Al-Andalus laisse un héritage décisif dans la langue portugaise, mais aussi dans la topographie du Portugal et dans les domaines des arts, de l'urbanisme, de la propriété foncière, des sciences, des techniques et de l'agriculture. Dans ce dernier domaine, les apports essentiels touchent à l'irrigation (connaissance des calculs de pente et de débit d'eau) et à la culture d'espèces nouvelles : les spécificités portugaises sont les fruits (notamment les pommes, les poires et les figues en Algarve), la vigne car la consommation du vin s'est perpétuée chez les Andalous, les céréales dont le riz en Alentejo, les légumes comme l'artichaut. De cette époque subsiste également la tradition décorative des azulejos.
Reconquista, formation du royaume de Portugal et expulsion des Maures
Dès le premier quart du VIIIe siècle, des militaires et des nobles germaniques réfugiés dans le Nord de la péninsule refondent une souveraineté chrétienne, le royaume des Asturies, et se lancent dans une longue guerre d'expansion territoriale vers le sud, la Reconquista, également appelée « Reconquête chrétienne ». Ce mouvement, qui englobe l'ensemble de la péninsule Ibérique, vise à faire repasser les terres ibériques perdues au profit des envahisseurs arabo-berbères sous souveraineté chrétienne.
Historiquement, la Reconquista commence avec la bataille de Covadonga (soit 718 ou 722), pendant laquelle l'élite wisigothique, réunie autour du roi Pélage (718-737), vainc une armée islamique et établit son autorité sur un réduit montagneux dans le nord de la péninsule, appelé Royaume des Asturies. Sous le règne d'Alphonse Ier (739-757), les croisés chrétiens des Asturies s'emparent des territoires jusqu'au Douro. Par la suite, la fragmentation du royaume en différentes entités donne naissance aux différents royaumes chrétiens Ibériques. Le royaume de León, héritier direct du royaume des Asturies, est à l'origine subdivisé en cinq provinces : les Asturies, le León, la Galice, le Portugal et la Castille. Chacune est dirigée par un comte. Au fur et à mesure des conquêtes, les terres sont divisées en comtés ou en duchés. En 868, Porto et Braga sont reprises. À partir du IXe siècle, le sud de la Galice forme un comté dynamique autour de sa métropole religieuse, Braga, et de son port, Porto. Il porte le nom de « Portucale » ou « Terra portucalensis » (pays de Portucale), du nom latin d'un bourg voisin de Porto (« Portucale »).
En 1095, le pape Urbain II lance la première croisade pour libérer les lieux saints et surtout réagir à la menace que représentent les Turcs récemment convertis à l'islam. Déjà, les réformes grégoriennes appellent à s'unir pour lutter contre toutes les croyances païennes et hérétiques. C'est dans ce cadre qu'en 1095, Alphonse VI de Castille et de León, annexant la Galice et le comté de Portugal, réunifie l'ensemble du León. Marié à Constance de Bourgogne, il fait appel à sa belle-famille bourguignonne pour l'aider à reconquérir la péninsule. Immédiatement, Raymond et Henri de Bourgogne, princes de la famille royale de France, issus d'une noblesse en quête de terre et de prestige, répondent favorablement à l'appel.En remerciement, et pour consolider ses liens avec les autres monarchies, Alphonse VI donne à Raymond sa fille Urraque, ce qui en fait le futur roi de León et de Galice. À Henri, il donne la main de sa fille bâtarde, Thérèse de León et le comté de Portugal en 1093. Dès lors, celui-ci installe sa cour près de Braga, dans la ville de Guimarães, considérée depuis comme « berceau » du Portugal. Installé dans ses domaines, Henri continue à prêter allégeance à Alphonse VI tout en bénéficiant d'une certaine autonomie, et poursuit la reconquête jusqu'au fleuve Mondego.
Suivant une vieille coutume germanique, après avoir remporté une victoire éclatante sur les musulmans lors de la bataille d'Ourique, le prince (princeps) Alphonse Henriques, fils de Henri de Bourgogne, est proclamé premier roi du Portugal par ses troupes sur le champ de bataille. La légende, teintée de mysticisme, veut que le Christ lui soit apparu pendant les combats. La situation est officialisée par le traité de Zamora (1143) par lequel Alphonse VII reconnaît le royaume de Portugal et son roi Alphonse Ier. Grâce à son habileté politique et militaire, ce dernier a réussi là où d'autres comtés échouent, et gagne son indépendance
Pendant plusieurs siècles, soutenus par les Templiers et les Chevaliers croisés, les souverains portugais poursuivent leur Reconquista vers le Sud jusqu'à ce que les Arabo-andalous qui dominent le sud de l'ancienne Lusitanie romano-barbare soient définitivement battus. Au début du XIIIe siècle, l'Inquisition catholique, une institution judiciaire chargée de lutter contre l’hérésie, et qui est à l'origine mise en place pour faire face aux mouvements manichéens cathares et albigeois, est étendue à la péninsule Ibérique dans une logique de persécution envers les hérétiques et les musulmans. Cependant, pragmatiques, les souverains portugais pratiquent une politique très tolérante vis-à-vis de leurs communautés juives et mauresques jusqu'au début du règne de Manuel Ier, afin de sauvegarder la paix civile, mais aussi pour des raisons financières et technologiques. Contrairement à ce qui se passe en Castille, l'Inquisition portugaise ne commence à jouer un rôle majeur dans l'expulsion des Maures et la persécution des Juifs au Portugal qu'à partir du XVIe siècle.
En l'an 1249, les souverains portugais de la dynastie de Bourgogne achèvent leur Reconquista, avec la conquête de la taïfa de Silves, puis la conquête de l'Algarve, avec la prise de Faro par Alphonse III. Après la destruction des dernières taïfas arabo-berbères de Lusitanie, le Portugal continue à s'investir dans les guerres de Reconquête de ses voisins, qu'il aide occasionnellement, alors que le pays intègre les apports arabo-andalous, et connait une homogénéisation religieuse, culturelle et ethnique progressive très lente, qui s'étend sur plusieurs siècles, au croisement des mondes ibérique, germanique, arabo-berbère et juif. La reconquête achevée, s'ouvre alors la période des Grandes découvertes.
Les découvertes
Le retour de la paix favorise l'exploration et l'expansion de nouveaux territoires au-delà des mers : c'est le temps des découvertes, grâce à Henri le Navigateur et au roi Jean II. Ceuta est conquise par le Portugal en 1415. En 1474, João Vaz Corte-Real et Alvaro Martins Homem auraient découvert le Groenland et Terre-Neuve.
Devenu roi, Jean II (1481-1495) centralise le pouvoir et continue de planifier de grandes expéditions. Jean II est le monarque de la Renaissance par excellence : il met fin à certains privilèges, oblige la noblesse à lui prêter serment, se débarrasse des traîtres. Ainsi, le duc Ferdinand II de Bragance, qui conspire avec les Rois catholiques, est arrêté et exécuté en 1483 ; en 1484, c'est le duc de Beja et de Viseu Diogo qu'il assassine lui-même pour les mêmes raisons. Le pouvoir et le domaine royal s'en trouvent agrandis, au prix de la haine de la grande noblesse. Ce ressentiment est d'autant plus vif que le roi privilégie désormais la poursuite des découvertes de nouvelles terres et surtout de la route des Indes. L'Afrique n'est plus l'enjeu ; il s'agit de la contourner.
La mission en est confiée à Diogo Cão, qui, en 1481, emporte le premier padrão (borne de pierre revêtue des symboles du Portugal plantée dans les terres découvertes). Il remonte le fleuve Congo, débarque au Royaume de Kongo, au Gabon, en Angola et en Afrique du Sud enfin, en 1486. Ces coûteuses expéditions ne sont plus royales mais confiées à des commerçants privés : en échange, ces derniers doivent découvrir 500 km de côtes par an. Ces commerçants se financent par l'exploitation des terres conquises et par l'établissement de São Jorge da Mina, dans le golfe de Guinée, qui voit converger l'or de la région. Construit en 1482, il vise aussi à interdire aux navires étrangers l'accès aux eaux portugaises. Le traité de Tolède () instaure un partage de l'Atlantique avec la Castille, lui abandonnant les découvertes à l'ouest des Canaries et assurant au Portugal le monopole en Afrique. Madère devient un point d'escale. Le vin, la canne à sucre et l'élevage s'y développent grâce à l'arrivée de migrants et d'esclaves. Le blé des Açores sert à ravitailler le pays. Le Cap-Vert, les îles de São Tomé et de Principe fournissent du sucre et du bétail. Jean II passe une alliance avec le roi du Kongo pour enseigner la religion catholique. Le commerce avec les Africains rapporte aussi de l’ivoire et des fruits tropicaux.
C'est ensuite Bartolomeu Dias qui est envoyé en 1487. Il double le cap de Bonne-Espérance (qu'il avait nommé « cap des Tempêtes » avant que le roi ne le rebaptise) le , par hasard, emporté par une tempête. Il atteint l'actuelle Namibie mais une mutinerie l'empêche d'aller plus loin.
Dans le but de préparer le voyage vers les Indes, Jean II envoie en 1488 des émissaires par voie de terre. C'est un moyen de recueillir des informations sur les courants dans l’océan Indien, peut-être même de trouver une trace du mythique Royaume du prêtre Jean. C'est d'abord Pedro de Montanoio et Pedro de Lisboa qui mènent l'expédition. Ils sont suivis de Pêro da Covilhã et d'Afonso de Paiva, qui apportent de précieux renseignements pour le voyage de Vasco de Gama.
Ils partent vers Jérusalem, accèdent au golfe Arabique, à Aden à l'embouchure de la mer Rouge. Ils se séparent ensuite. Paiva part vers l'Abyssinie à la recherche du prêtre Jean. Covilhã part vers les Indes. Il passe par Calicut, puis Sofala, Madagascar, revient au Caire où il apprend la mort de son compagnon. Il envoie ses informations au roi et part pour Ormuz. Il parvient à la cour du négus chrétien, s'y marie et y finit ses jours. Grâce à lui, on fait construire des navires spéciaux : la caravelle va être remplacée par la caraque permettant d'emporter plus d'équipage, d'armes et de ravitaillement.
Pendant ce temps là, les Rois catholiques prennent Grenade et mettent fin à la reconquête (1492). Cette victoire leur laisse les mains libres pour entreprendre des expéditions. Christophe Colomb embarque en leur nom pour atteindre les Indes par l'ouest. Jean II, à qui il s'adresse auparavant, refuse de financer ce voyage, privilégiant la route découverte par Vasco de Gama et estimant, à juste titre, que Colomb se trompe. En 1493, Christophe Colomb revient d'Amérique et c'est à Lisbonne qu'il débarque en premier. Il annonce au roi que les terres découvertes lui appartiennent en vertu du traité d'Alcaçovas. Jean II les revendique donc auprès du pape Alexandre VI. Une bulle papale établit alors une division des terres qui passe à 100 lieues à l'ouest du Cap-Vert. Jean II exige un autre accord : le , Espagnols et Portugais signent le traité de Tordesillas qui fixe la limite à 370 lieues. Ce nouvel accord permet au Brésil, qui n'a pas encore été découvert, d'être portugais tout en abandonnant à l'Espagne les nouvelles terres d'Amérique.
C'est le nouveau roi Manuel Ier (1495-1520) qui tire profit de la politique intelligente de Jean II. Celui-ci, très impopulaire auprès de la noblesse, meurt probablement empoisonné en 1495. Vasco de Gama arrive aux Indes le , ouvrant la voie au commerce très fructueux des épices contrôlé jusque là par les Vénitiens. Son voyage a été minutieusement préparé. Mais, à son arrivée à Calicut, il est mal accueilli par le Zamorin. En 1499, une deuxième expédition, commandée par Pedro Alvares Cabral est envoyée avec l'objectif de s'imposer, par la force si nécessaire. Le , Cabral aborde au Brésil et en prend possession. Il envoie un messager à Lisbonne et poursuit sa route.
Arrivé à Calicut, il reçoit meilleur accueil mais très vite les Portugais doivent affronter la concurrence des Vénitiens, des Turcs et des Égyptiens. C'est la fin des voyages pacifiques. Les Portugais tirent parti des divisions entre les hindous et les musulmans de la région. Une feitoria est créée à Cochim puis à Cananor, Sofala, Quiloa et Malacca (1511). Elles sont protégées par des forteresses et une armada. On finit par installer une administration et créer un poste de vice-roi des Indes pour maintenir l'ordre dans l’océan Indien : Francisco de Almeida en est le premier, suivi d'Afonso de Albuquerque qui installe de solides forts aux points stratégiques (Malacca, Siam, Goa qui devient la capitale de cet empire, Moluques, Timor, archipel de Socotra, Ormuz) et consolide cet empire naissant. Tout l'océan Indien est bientôt sous contrôle.
Amerigo Vespucci fait partie du premier voyage officiel au Brésil (1501). La découverte du Brésil permet aux commerçants portugais de s’approprier le pau-brasil, un bois de teinture et de construction très recherché. Mais le pays semble peu intéressant au départ jusqu'à ce que la concurrence espagnole et française se fasse sentir. On y envoie des colons, on crée des factoreries. Les Indiens du Brésil, puis de nombreux Africains, sont mis en esclavage pour la culture du sucre. En 1600, le Brésil est le premier producteur mondial de sucre et le principal fournisseur de ressources du Portugal. Au XVIIe siècle, les Bandeirantes découvrent également au sud de la colonie des mines d’or et de diamants qui sont exploitées grâce à une même main-d’œuvre servile. Les découvertes se poursuivent par ailleurs : en 1495, Pêro de Barcelos et João Fernandes Lavrador explorent les côtes du Canada et du Groenland (donnant son nom au Labrador). En 1500, Gaspar Corte Real arrive à Terre-Neuve. En 1513, Jorge Álvares arrive en Chine et Tomé Pires à Pékin.
C'est la naissance d'un véritable empire reposant sur les comptoirs. La Casa da India à Lisbonne contrôle et vérifie les marchandises importées d'Orient. Les richesses venues des colonies (épices, or, pierres…) affluent pendant les siècles suivants. Jamais le pouvoir royal n'a été aussi grand. Manuel Ier réforme d'ailleurs l'administration avec un nouveau code législatif afin de renforcer encore ce pouvoir (les ordonnances Manuelines de 1521). Mais il sait aussi ménager la noblesse (contrairement à son prédécesseur) qui, grâce aux nouvelles colonies, finit par y trouver son compte. En 1555, le pays est considéré comme le plus riche d'Europe. C'est également une période de croissance démographique. Le Portugal compte environ 1,5 million d'habitants ; tout un peuple vit alors impliqué dans le colonialisme. Beaucoup partent vers les colonies. L'esclavage fait que le travail devient une valeur dévaluée.
Il s'agit également d'une période de développement culturel avec le début des grandes constructions influencées par la Renaissance, avec l'installation définitive de l'université à Coimbra. Le style manuélin, gothique propre au pays, se propage sous l'influence de grands architectes (Mateus Fernandes, les frères Diogo et Francisco de Arruda et les Français Diogo Boitaca ou Nicolau de Chanterene). La littérature connaît aussi une époque faste avec les œuvres de João de Barros, Damião de Góis ou Gil Vicente.
Union ibérique
Le , la bataille d'Alcácer-Quibir tourne au carnage, avec des milliers de morts et de nombreux prisonniers. Une centaine de rescapés rentrent à Lisbonne. Le roi est mort et son corps n'est pas retrouvé. C'est un désastre militaire, économique et politique : la défaite marque la fin de la dynastie d'Aviz et d'une époque glorieuse, chantée dans Les Lusiades par le poète Luís de Camões, disparu également à cette époque. Quatre siècles d'une indépendance chèrement acquise sont alors remis en cause.
Outre la crise politique et économique, c'est une crise morale que connaît le pays : une Couronne endettée, des milliers de morts et des prisonniers dont il faut payer la rançon minent le pays. C'est dans cette atmosphère que vont surgir et prospérer de nombreuses prophéties évoquant le retour du jeune roi : le sébastianisme. Pas moins de quatre imposteurs cherchent à se faire passer pour le roi au cours de cette période, le dernier, un Italien, est pendu en 1619. Le vieux cardinal Henri, dernier fils de Manuel Ier, monte sur le trône le . Il est chargé de se trouver un successeur. De nombreux prétendants existent dont Philippe II d'Espagne, qui apparaît comme le mieux à même d'assurer la conservation de l'Empire portugais en renouvelant ses infrastructures maritimes et surtout en soldant la dette portugaise. Cette solution a les faveurs de la noblesse et du clergé. Le peuple, lui, favorise un Portugais (dom Antoine, prieur de Crato) mais les Cortes n'arrivent pas à trancher. La grande bourgeoisie penche du côté espagnol pour des raisons économiques. Elle entend profiter des marchés offerts par l'Espagne et ses colonies.
Henri Ier meurt sans les départager. Philippe II s'impose avec une démonstration de force face au prieur de Crato lors de la bataille d'Alcántara (). Celle-ci marque la fin de la dynastie d'Aviz et le début de celle des Habsbourg. À l'occasion de la tenue des Cortes à Tomar (1581), le roi Philippe de Habsbourg, intronisé sous le nom de Philippe Ier de Portugal, accorde son pardon aux soutiens du prieur de Crato et s'engage à respecter l'ensemble des lois et coutumes portugaises. L'exploitation des colonies et l'administration du pays restent du domaine exclusif des Portugais. Dirigé par les Habsbourg, le Portugal est désormais associé in persona regis à la Monarchie catholique espagnole, la cour portugaise est transférée de facto à Madrid, mais le royaume conserve son indépendance juridique, ainsi qu'une grande autonomie politique. L'Union ibérique permet au royaume de retrouver une certaine stabilité économique, avec le paiement momentané de l'immense dette publique portugaise, mais le pays perd aussi progressivement des positions au profit de la Hollande et de la France, traditionnellement opposés aux Habsbourg. En 1588, le conflit entre l'Espagne et l'Angleterre aboutit à l'épisode de l'Invincible Armada, à l'occasion duquel le Portugal perd 12 navires. Les premiers accrocs entre Portugais et Castillans surgissent à la fin du règne de Philippe Ier et se poursuivent avec son successeur, Philippe II de Portugal, qui se désintéresse du pays et de l'administration en général. Il délègue ses pouvoirs au vice-roi qui cherche à centraliser le pouvoir et à remettre en cause l'autonomie du Portugal. Le nouveau roi se rend impopulaire en augmentant les impôts, en affichant une certaine tolérance envers les nouveaux chrétiens et en signant une trêve avec la Hollande qui en profite pour conforter sa place dans les colonies portugaises.
Un nouveau code législatif est introduit : les Ordonnances Philippines (1603). Philippe IV bafoue les accords sur l'autonomie du pays et alourdit encore la pression fiscale. Des troubles éclatent. Face à la concurrence des Anglais et des Hollandais, les places portugaises tombent une à une : Ormuz en 1622, Bahia en 1624, Arguin en 1633, São Jorge da Mina en 1637. Dès lors, le Portugal se tourne essentiellement vers le Brésil déjà menacé par les Néerlandais et les Français. L'Espagne devient la cause de tous les maux du pays. Des révoltes éclatent et l'unité nationale en sort renforcée. Les opposants soutiennent le duc Jean de Bragance, ils s’emparent du palais royal de Lisbonne le . Le 15 du même mois, Jean devient roi de Portugal sous le nom de Jean IV.
Restauration, absolutisme et libéralisme
La restauration de l'indépendance du Portugal est suivie d'une guerre contre l'Espagne qui dure jusqu'en 1668. Avec le traité de Lisbonne, l'Espagne reconnaît définitivement l'indépendance de son voisin.
Dans la fin du XVIIe siècle et dans la première moitié du XVIIIe siècle, débute l'exploration minière du Brésil, où il fut découvert de l'or et des pierres précieuses. Ces richesses servaient aussi pour payer des produits importés, majoritairement d'Angleterre (il n'existait presque pas d'industrie textile dans le royaume portugais et tous les tissus étaient importés d'Angleterre). Le commerce externe se basait sur l'industrie du vin et le développement économique du royaume fut impulsé, déjà dans le règne de José I, par les efforts du Marquis de Pombal (ministre entre 1750 et 1777), pour inverser la situation avec de grandes réformes mercantilistes. Ce règne fut marqué par un violent séisme qui a dévasté le Portugal (Lisbonne, Madère et l'Algarve), le Maroc, le Royaume-Uni et d'autres pays le .
Pour ne pas briser l'alliance avec l'Angleterre, le Portugal a refusé d'adhérer au blocus continental, en conséquence il fut envahi par les armées napoléoniennes en 1807. La cour et la famille royale portugaise se sont réfugiées au Brésil. Lisbonne n'est plus la capitale du Royaume-Uni portugais, celle-ci étant transférée à Rio de Janeiro, où il reste jusqu'en 1821, quand Jean VI est retourné à Lisbonne pour la première Constitution. Dans l'année suivante, le , son fils Pedro IV s'était proclamé empereur du Brésil.
Pendant le XIXe siècle, le Portugal a vécu d'importantes perturbations politiques et sociales (une guerre civile et des révoltes ainsi que des soulèvements militaires, comme la Révolution de Septembre, la Révolution du Minho, celle de Patuleia…). Dans la fin du XIXe siècle, les ambitions coloniales portugaises se distinguent de celles des Anglais, différence qui est à l'origine de l'ultimatum britannique de 1890. Les concessions aux exigences britanniques et la croissance des problèmes économiques propulsent la monarchie dans un discrédit croissant. Charles Ier et le prince héritier Louis Philippe de Bragance sont assassinés le . La monarchie se maintient pendant deux ans, sous le règne de Manuel II, mais une révolution l'abolit le à la suite de laquelle le Portugal devient une république.
République, Estado Novo et retour à la démocratie
Le , peu après la proclamation de la République, le jeune roi Manuel II s'exile en Angleterre. Pendant la Première Guerre mondiale, le corps expéditionnaire portugais est envoyé en France pour servir au côté des alliés. Après plusieurs années d'instabilité politique marquées par des luttes de travailleurs, des tumultes, des homicides politiques (comme la nuit sanglante de 1921) et des crises financières, l'armée prend le pouvoir en 1926 (coup d'État militaire conduit par le général Gomes da Costa). Le général Oscar Carmona est nommé président du Conseil puis devient chef de l'État.
Le régime militaire nomme António de Oliveira Salazar, un enseignant de l'université de Coimbra, ministre des Finances, avec pleins pouvoirs budgétaires afin de redresser l'économie du pays, ce qu'il fait de façon spectaculaire en un an. Il est nommé en 1932 président du Conseil par le président de la République, le général Óscar Carmona.
Salazar consolide le pouvoir autoritaire et introduit en 1933 une nouvelle constitution qui lui donne les pleins pouvoirs. Habile homme d'État, il écarte du pouvoir tous les généraux du coup d'État de 1926, et définit dans un discours l'orientation du régime : « tout pour la nation, rien contre la nation ». Il fonde le parti unique, l'Union nationale. Partis, syndicats et grèves sont interdits. L'Estado Novo (« État Nouveau »), régime à parti unique, nationaliste, proche de l'idéologie du parti fasciste italien (du moins jusqu'en 1945), reste en place pendant plus de quarante ans. Il est neutre pendant la Seconde Guerre mondiale.
Le refus du régime dictatorial portugais de décoloniser les provinces d'outre-mer entraîne une série de conflits coloniaux. La première colonie à se révolter est l'Angola en 1961, suivie par la Guinée-Bissau en 1963 et enfin par le Mozambique en 1964. L'Inde profite de cette situation pour annexer Goa, de Damao, de Diu et des îles Anjidiv lors de l'opération Vijay en décembre 1961. Entre 1974 et 1975, le Portugal doit donner l'indépendance à toutes ses colonies, seules deux régions n'ont pas pris l'indépendance : Madère et les Açores. Le , les deux premières colonies qui ont pris leur indépendance vis-à-vis du Portugal sont le Cap-Vert et Guinée-Bissau. Le Timor oriental fut aussi une colonie portugaise jusqu'au , où il acquiert son indépendance. Mais neuf jours plus tard, l'Indonésie l'annexe militairement, mais perd la bataille grâce à la résistance populaire, aux efforts du Portugal et la pression de l'ONU.
Avec un coup d'État militaire, le 25 avril 1974, le gouvernement instauré par Salazar et dirigé par Marcelo Caetano depuis 1968 (Salazar ayant quitté le pouvoir à la suite d'un accident cérébral, dont il meurt deux ans plus tard) est renversé. La foule manifeste dans la capitale portugaise pour soutenir les militaires dirigés par le général António de Spínola. Les jours suivants, les prisonniers politiques sont libérés, la censure de la presse est levée et le secrétaire général du parti socialiste, Mário Soares, rentre de son exil en France. Il est élu deux fois président de la République, la première fois en 1986 et la seconde en 1991.
Dans les années 1940-1960, le Portugal est parmi les membres fondateurs de l'OTAN, de l'OCDE et de l'AELE. Il quitte cette dernière en 1985 pour entrer dans la Communauté économique européenne en même temps que l'Espagne l'année suivante.
En 1999, le Portugal adhère à la zone euro, et le 20 décembre de la même année, le gouvernement portugais rend le territoire de Macao à la Chine. Depuis son entrée dans l'Union européenne, le pays a présidé le Conseil européen trois fois et en 2007, la capitale du pays voit la signature du traité de Lisbonne.
Spécificités géopolitiques du Portugal
Frontières terrestres internationales actuelles
D'un point de vue juridique, le Portugal est le pays ayant les plus anciennes frontières terrestres internationales d'Europe et du monde encore en vigueur. La Raia, frontière entre le Portugal continental et la Castille (fondue dans l'Espagne actuelle), date de 1297, avec le Traité d'Alcanizes (plus ancien traité international définissant des frontières encore en vigueur).
Dans les siècles suivants, les accords de démarcation entre les souverains portugais et castillans, puis espagnols, concernent l'organisation de communautés locales autonomes dites « transraianas » au statut particulier : les villages de Santiago, Rubiás e Meaus, par exemple, dits Couto Misto. Ils ne modifient pas le tracé de la Raia. L'Union des couronnes ibériques (1580-1640) n'a pas d'incidence sur le tracé de la frontière luso-castillane, puisque le Portugal maintient son existence en tant qu’État souverain (l'union n'est pas politique mais personnelle, in persona regis (en la personne du roi) : les souverains castillans règnent au Portugal sous un nom de règne portugais, avec stricte séparation des administrations, monnaies, armées et Empires).
Enfin, la ville d'Olivença, administrée par l’État espagnol depuis 1801 et violemment castillanisée sous le franquisme, reste un territoire juridiquement portugais, reconnu comme tel par l'Espagne depuis les traités de Cadix (1810) et de Vienne (1817), et soumis à rétrocession (bien que sans cesse repoussée par Madrid). Une partie des travaux publics dans la région est d'ailleurs à la seule charge du Portugal (restauration du pont da Ajuda en 1994-2000). Et un nombre important d'habitants d'Olivença possèdent la nationalité portugaise (à laquelle ils peuvent prétendre au même titre que les Lisboètes, sans que celle-ci puisse leur être légalement refusée). En 2008, Olivença, les villes frontalières (raianas) portugaises d'Arronches, Campo Maior, Estremoz, Portalegre et Elvas d'un côté, et les villes frontalières espagnoles de La Codosera, Alburquerque et Badajoz de l'autre, sont arrivées à un accord en vue de la création d'une euro-région mixte incluant Olivença, afin de trouver une solution innovante au problème.
Les frontières insulaires du Portugal (anciennes Ilhas Adjacentes (pt)) datent quant à elles du milieu du XVe siècle : 1419 pour Madère, 1427-1432 pour les Açores, et enfin 1438 pour les Ilhas Selvagens.
Le Portugal dans le cadre ibérique
Dans le cadre ibérique, l’État portugais est un reliquat historique, dans le sens où il est le dernier État chrétien né de la Reconquista, et le seul héritier actuel des Espagnes médiévales, les autres nations et royaumes ibériques ayant été absorbés, démembrés et castillanisés sous l'autorité de Madrid depuis les décrets de Nueva Planta (1707-1716).
L'État-nation portugais
« Le Portugal est communément considéré comme le plus vieil État-nation d'Europe.
Indépendant de facto depuis la fin des années 1120 (Bataille de São Mamede), disposant d'un roi reconnu dans ses frontières dès 1139, l’État portugais, obtient la reconnaissance formelle de son indépendance de jure avec le traité de Zamora le 5 octobre 1143.
La langue portugaise, marqueur fondamental de la nationalité, apparaît comme langue littéraire différenciée du latin dès 1198, avec la Cantiga da Ribeirinha, écrite par le troubadour Paio Soares de Taveirós (pt). Une quinzaine d'années plus tard, le testament du roi Alphonse II, daté de 1214, est rédigé dans un portugais compréhensible pour un lusophone du XXIe siècle. Ce texte est communément considéré comme le plus ancien document littéraire long en prose rédigé en langue portugaise. À partir de 1255, le portugais est adopté comme langue de registre (língua de registo) dans la Chancellerie Royale (Chancelaria Régia), sous le règne du roi Alphonse III. Enfin, en 1385, avec l'arrivée de la dynastie d'Avis, le portugais devient la seule langue officielle du royaume pour les actes juridiques et administratifs (cinquante ans avant les normes de la Chancellerie anglaises et plus de 150 ans avant l'Ordonnance de Villers-Cotterêts). La précocité et l'homogénéité linguistique du Portugal permettent le développement rapide d'une littérature très riche, qui contribue à l'émergence d'un sentiment national (comme en attestent les chansonniers médiévaux, ou Cancioneiros, encore étudiés de nos jours dans les lycées portugais, avec les cantigas de amigo, les cantigas de amor et les cantigas de escárnio e maldizer).
La nation portugaise, quant à elle, émerge dès le XIIe siècle et se manifeste en tant qu'entité politique autonome de ses souverains vers le milieu du XVe siècle. Dès 1254, les trois ordres du Royaume sont associés à la gestion du pouvoir, avec la convocation de la noblesse, du clergé et du peuple aux Cortes de Leiria par le roi Alphonse III de Portugal. En 1372, le petit peuple, surnommé « arraia-miúda », intervient violemment sur la scène politique pour s'opposer au mariage du roi Fernando Ier de Portugal et Éléonore Teles de Menezes, avec des tumultes et une rébellion populaire. Lors de la crise de Succession au Trône de 1383-1385, les trois ordres prennent parti pour Jean Ier de Portugal et défendent l'indépendance du pays face aux prétentions du roi Jean Ier de Castille. Le peuple (artisans, bourgeoisie et population de Lisbonne), sur-représenté dans le « partido nacionalista », prend une part active dans les Cortes de Coimbra de 1385 (pt) et est le grand bénéficiaire du changement de dynastie.
Du point de vue des sources écrites, alors que le concept moderne de Nation émerge en Europe occidentale fin XVIIIe-début XIXe siècle, avec la Révolution française, la Déclaration des Droits de l'Homme de 1789 et les Guerres napoléoniennes, les chroniques et les textes littéraires portugais mentionnent dès la Renaissance une « Nation portugaise », entité collective cohérente politiquement et culturellement, dont l'occurrence est fréquente dans tous les textes classiques du XVIe siècle, par exemple dans les épîtres de Diogo do Couto (« Só a esta nossa nação portuguesa faltou esta glória »), les chroniques de João de Barros (« a nação portuguesa (…), que mais se apressa de fazer que dizer (…) »), les textes de Luís de Camões (dans Les Lusiades notamment, Chant V, strophe 97, où Vasco de Gama est l'incarnation de la Nation conquérante), et partout dans la Pérégrination de Mendes Pinto. Les bases de la culture portugaise actuelle sont d'ailleurs fixées pour l'essentiel aux XVe et XVIe siècles (bases de la culture culinaire, musicale, littéraire, religieuse, architecturale, de la mythologie nationale, de l'imaginaire collectif, etc.), pendant l'âge d'or du Portugal et son expansion outre-mer.
La précocité de l'État-nation portugais et ses conséquences sont l'objet de nombreuses études historiques. »
Le Portugal et l'océan Atlantique
Reliquat de son immense empire colonial et de sa domination passée des océans, le Portugal, pays aux dimensions modestes, possède aujourd'hui une gigantesque zone économique exclusive, puisqu'il exerce sa souveraineté sur un espace maritime de plus de 1 720 000 km2 (soit plus de 18 fois sa superficie terrestre). Le Portugal, qui occupe la 111e place en termes de superficie terrestre, possède la 11e plus grande zone d'exclusivité maritime du monde, devant l'Inde et la Chine. Celle-ci est en voie d'être agrandie au-delà des 350 miles actuels, ce qui accroîtrait considérablement ses dimensions et créerait une ZEE continue entre le Portugal continental, les Açores et Madère. Dans le cadre de l'Union européenne, le Portugal est le pays qui possède la plus grande juridiction maritime située dans l'UE (c'est-à-dire en excluant les lointains territoires britanniques d'outre-mer et les territoires français d'outre-mer, situés hors-Union européenne).
Conséquence de cet état de fait, 53 % du commerce extérieur de l'Union européenne transite par les eaux portugaises, 60 % du commerce extérieur portugais se fait par voie maritime, et 70 % des importations nationales sont acheminées par la même voie (dont la totalité du pétrole et les 2/3 du gaz portugais). Acteur important dans l'océan Atlantique, l’État portugais s'est compromis à assurer les recherches et sauvetages maritimes (Search And Rescue) sur un espace de responsabilité de presque 6 millions de kilomètres carrés (soit plus de 63 fois sa surface terrestre). D'un point de vue militaire, l’État portugais affecte une part importante de ses forces navales et aériennes au service des missions de l'OTAN dans l'Atlantique nord, assurant la protection des voies maritimes et aériennes pour le renforcement de la sécurité européenne. D'un point de vue économique, le pays continue à tirer une part importante de ses richesses de la mer, puisque 11 % de son PIB, 12 % de ses emplois, 17 % de ses recettes fiscales et 90 % de ses recettes touristiques sont liés aux océans.
La vocation océanique traditionnelle du Portugal est l'objet d'innombrables études dans les milieux universitaires, en histoire, en géographie, en géopolitique et en économie. D'après l'historien Virgilio de Carvalho, une des étapes essentielles de la viabilisation de l’État-nation portugais a été son « atlantisation », aux XIVe et XVe siècles. Son prédécesseur, l'historien Jaime Cortesão (pt) a résumé l'histoire du Portugal dans la formule : « L'histoire portugaise peut se résumer en une série d'efforts pour la mise à profit des possibilités atlantiques du territoire [...]. », la réalisation de ces efforts ayant « forgé l'Individualité » du Portugal et « influé sur l'histoire de l'humanité. »
Quelques données géopolitiques et historiques
- Le Portugal est le premier grand État européen et le cinquième territoire au monde à abolir la peine de mort (après le Tibet, le Grand-Duché de Toscane, la République de Saint-Marin et le Venezuela). La peine de mort pour délits politiques est abolie constitutionnellement en 1852, durant le règne de Marie II. La peine de mort pour délits civils est abolie en 1867, sous le règne du roi Louis Ier. Maintenue à titre exceptionnel dans l'armée jusqu'en 1911, son abolition définitive est indiquée dans la nouvelle Constitution de la Première République Portugaise (1911), et réitérée dans la Constitution républicaine de 1976 : « la peine de mort ne sera appliquée sous aucune circonstance ». La dernière exécution pour délits politiques date de 1834, et de 1846 pour des délits civils (à Lagos, dans l'Algarve). Selon les registres officiels, la dernière exécution d'une femme au Portugal date du 1er juillet 1772.
- L'alliance anglo-portugaise entre le Portugal et l'Angleterre (puis la Grande-Bretagne et le Royaume-Uni) est la plus ancienne alliance militaire au monde encore en vigueur. Conclue en 1373, elle est activée de facto pendant la guerre de succession au Trône de 1383-1385 contre la Castille. Un pacte d'assistance et d'entraide entre le Portugal et l'Angleterre est scellé à l'issue de cette guerre, en mai 1386, avec le traité de Windsor. Invoquée sans cesse depuis cette époque, notamment lors des invasions françaises au Portugal, cette alliance militaire a encore été réactivée tout au long du XXe siècle.
- Le Portugal est le premier État européen ayant fondé un empire mondial, avec un ensemble de territoires répartis sur cinq continents. L’empire portugais, qui dure six siècles, est par ailleurs considéré comme le plus long des empires coloniaux européens modernes (1415-2002). Le Portugal est le dernier grand État européen à clore son processus de décolonisation, en Afrique avec les indépendances de l'Angola, du Mozambique, de la Guinée-Bissau du Cap-Vert et de Sao Tomé-et-Principe au milieu des années 1970, et en Asie avec la rétrocession de Macao à la Chine en 1999 et la prise d'indépendance du Timor oriental en 2002.
- Le Portugal est le premier État européen ayant fondé une ville européenne en Asie après la fin de l'Antiquité, avec la conquête et la refondation de Goa en 1510. Devenue capitale de l'Empire portugais d'Orient en 1530, Goa est considérée comme l'une des plus grandes villes mondiales de la période moderne, avec une population de 200 000 habitants. L’État portugais est par ailleurs la principale puissance maritime dans l'océan Indien et le plus grand vendeur d'armes à feu en Asie du XVIe au XVIIIe siècle, permettant notamment l'armement et l'unification politique du Japon, la mise à mal de l'hégémonie ottomane dans l'ouest de l'océan Indien et l'arrêt de l'expansion musulmane en Éthiopie.
- Le Portugal est le seul État européen dont la capitale a été située hors d'Europe, avec le transfert de la cour en 1807 à Rio de Janeiro et la constitution du Royaume-Uni du Portugal, du Brésil et de l'Algarve. Rio de Janeiro a été la capitale du Portugal de facto entre 1807 et 1815, et de jure entre 1815 et 1822. Pendant cette période, les principales institutions du royaume, la banque du Portugal, l'état-major portugais, l'ensemble de la haute noblesse et de la famille royale résidaient sur le continent américain. Le roi de Portugal est par ailleurs le seul souverain régnant européen à s'être déplacé personnellement dans sa colonie américaine, et à y avoir régné durablement, légiférant pour le Portugal depuis l'autre côté de l'Atlantique (la reine Marie Ire et le roi Jean VI).
- Le Portugal est le premier État européen à se lancer dans la traite négrière dans l'Atlantique, avec l'arrivée d'un premier lot d'esclaves noirs à Lisbonne dès 1441, amené par le navigateur Antão Gonçalves (esclaves achetés sur la côte de l'Argüim la même année). Le Portugal est le premier État européen à dévier massivement les circuits de la traite négrière africaine vers les îles de l'Atlantique puis vers les Amériques. Les Portugais sont le seul peuple européen à pratiquer massivement et systématiquement la chasse aux esclaves dans l'Atlantique (avec les pombeiros en Angola, les bandeirantes au Brésil, l'achat et la capture d'esclaves dans le Golfe de Guinée), l'océan Indien et le Pacifique (avec les prazeiros (pt) au Mozambique, les Ferengis dans golfe du Bengale et les Fu-lang-chi en Chine). Le Portugal est la principale puissance esclavagiste européenne de la période moderne. Il fonde le système des plantations dès le XVe siècle à Madère, transposé le siècle suivant au Brésil, qui devient le plus grand Empire esclavagiste d'Amérique (et le dernier à abolir l'esclavage le 13 mai 1888).
- Le Portugal est le premier grand État européen à abolir l'esclavage sur son territoire métropolitain et dans ses possessions de l'océan Indien. Le 12 février 1761, sous le règne du roi Joseph Ier, le Marquis de Pombal abolit l'esclavage dans le royaume de Portugal et dans les Indes portugaises (partie asiatique de l'Empire portugais). Le Brésil lui-même n'échappe pas à cette première vague d'abolitions pombalines, lancées sur son sol. En 1755, le marquis de Pombal avait libéré les Indiens du Brésil et promulgué des mesures en faveur de leur intégration dans la société coloniale (Diretório dos Índios (pt)), sans toutefois toucher à la condition servile des Noirs ou à la traite négrière (en raison de leur importance capitale pour l'économie brésilienne). Le congrès de Vienne et l'opposition des Anglais font de l'abolition de la traite et de l'esclavage au Brésil et en Afrique une question à résoudre d'urgence pour Lisbonne. Le trafic et le commerce d'esclaves sont abolis dans tout l'Empire portugais en 1836. Les esclaves de l'État sont libérés par décret en 1854 et ceux de l’Église par décret en 1856. La loi du 25 février 1869 proclame l'abolition de l'esclavage dans tout l'Empire portugais, jusqu'à son terme définitif de 1878.
- La marine de guerre portugaise est la plus ancienne branche des forces armées du monde encore active. Elle est en activité de facto au moins depuis 1180, sous le règne d'Afonso Henriques, lorsqu'elle remporte une victoire face à une escadre musulmane au large du cap Espichel. D'un point de vue strictement juridique, la fondation de la marine de guerre portugaise (en tant qu'institution) date du début du XIVe siècle. En 1312, le roi Denis Ier donne une organisation permanente à la Marine Royale portugaise, dont le genevois Manuel Pessanha est nommé premier amiral en 1317.
- Le Portugal est l'un des premiers États européens modernes à s'être doté d'un arsenal de marine, avec la fondation des Tercenas Navais de Lisbonne, dont les structures apparaissent sous le règne du roi Denis Ier (1279-1325), et qui sont fondées formellement et organisées en 1377, sous le règne du roi Fernando Ier. L'arsenal des Tercenas est rebaptisé Arsenal da Ribeira das Naus sous le règne du roi Manuel Ier, puis Arsenal Real da Marinha au XVIIIe siècle et enfin Arsenal da Marinha de Lisboa en 1910. Il est désactivé et remplacé par l'Arsenal do Alfeite en 1938. L'arsenal de Lisbonne permet l'émergence d'une flotte de guerre très tôt dans l'histoire du pays, et sert à équiper les armadas portugaise tout au long de l'expansion outre-mer du Portugal.
- Conséquence de ses innombrables campagnes militaires menées un peu partout dans le monde pendant six siècles, le Portugal est traditionnellement considéré comme un pays novateur dans le domaine de la médecine. Dès le XVIe siècle, le pays se dote d'un réseau d'hôpitaux royaux et de Maisons d'Assistance Publiques, les Saintes Maisons de la Miséricorde (Santa Casa da Misericórdia), qui visent à remettre les soldats sur pied, et qui s'étendent rapidement dans tout l'empire. L'Hôpital Royal de Goa, dans l'Orient portugais, est notamment considéré comme un modèle du genre aux XVIe et XVIIe siècles. Organisé suivant un règlement précis, avec des hiérarchies médicales de personnel qualifié et non-qualifié, on y impose des mesures d'hygiène telles que le lavage de mains et des ustensiles médicaux, la désinfection des vêtements et des chambres des malades, une nourriture saine et équilibrée. Pendant toute la période moderne le travail de consignation systématique de la flore et de ses propriétés curatives, effectué tantôt par des intellectuels comme l'apothicaire Tomé Pires dans sa Soma Oriental, tantôt par de simples aventuriers ou soldats, tantôt par des jésuites, notamment en Inde, en Malaisie et au Brésil, permet des progrès décisif pour la pharmacologie. Aux XVIIIe et XIXe siècles, l'abbé José Custodio da Faria, un Portugais de Goa dont Alexandre Dumas fera un personnage-clé du roman Le Comte de Monte-Cristo, marque fortement de son empreinte la pratique du magnétisme animal et de l'hypnose en Europe. Cette tradition d'excellence se poursuit jusqu'au XXe siècle. En 1883, le médecin et chercheur à l'École médico-chirurgicale de Porto António Teixeira de Sousa est récompensé du prix Macedo Pinto pour sa thèse « Enervação do coração ».En 1949, le médecin, neurologue et chercheur Egas Moniz reçoit le prix Nobel de médecine pour ses travaux déterminants sur le cerveau humain et la chirurgie cérébrale. Et aujourd'hui encore, en dépit d'un grand nombre de défaillances dans son système médical, le Portugal est considéré comme un pays précurseur dans la recherche scientifique et dans des domaines précis, imposant de nouveaux modèles, notamment dans sa lutte contre la toxico-dépendance.
Division administrative
Les principales divisions administratives portugaises sont les 18 districts du continent et de ses régions autonomes des Açores et de Madère, qui se subdivisent en 308 municipalités et 4 257 paroisses (pt). Les districts constituent la plus importante subdivision du pays. Ils servent de base pour diverses divisions administratives, comme les cercles électoraux.
Avant 1976, les deux archipels étaient aussi intégrés dans la structure générale des districts portugais avec toutefois des spécificités administratives tenant compte de leur statut de districts indépendants des îles adjacentes, décret-loi no 36453, du 4 août 1947 qui se traduit par l’existence de trois districts indépendants aux Açores et un pour Madère :
- Açores : le district de Angra do Heroísmo, le district da Horta et le district de Ponta Delgada ;
- Madère : le district du Funchal.
Depuis 1976, les Açores et Madère sont devenues des régions autonomes, avec un statut politico-administratif et des agences du gouvernement propres (article 6.º, paragraphe 2, de la Constitution de la République portugaise). Actuellement, la division administrative se résume par le tableau suivant :
Le Portugal est aussi divisé en trois régions NUTS de premier niveau (séparant le territoire métropolitain des deux régions autonomes). Le second niveau NUTS est constitué par les 18 districts de la métropole, mais ne subdivise pas les anciens districts des Açores qui constituent une seule région NUTS-2 comme aussi Madère : il y a donc 20 régions NUTS de niveau 2, de population relativement équilibrée (à l’exception des districts de Porto et Lisbonne qui sont 5 à 20 fois plus grands que les autres). Cette division, élaborée à des fins statistiques, est entrée en vigueur dans tous les pays de l’Union européenne.
Politique et administration
Organisations des pouvoirs
Le Portugal est un État unitaire à régime semi-présidentiel unicaméral fondé sur la Constitution portugaise du (constitution modifiée en 1982, 1989, 1992, 1997, 2001, 2004 et 2005).
Les trois principales composantes du pouvoir sont le président de la République et le gouvernement, l'Assemblée de la République, et la justice. La Constitution accorde la division ou la séparation des pouvoirs entre les branches législative, exécutive, et judiciaire. La République du Portugal est un État laïque. Le président de la République, élu pour cinq ans, assume un rôle exécutif, qu'il partage avec le Premier ministre. L'actuel président est Marcelo Rebelo de Sousa , élu en . Le pouvoir législatif est détenu par l'Assemblée de la République (Assembleia da República), parlement unicaméral composé de 230 députés élus pour quatre ans (dont quatre représentent les Portugais de l'étranger).
Le gouvernement est dirigé par le Premier ministre, qui, depuis les élections du , se nomme António Costa, secrétaire-générale du PS. Le Premier ministre nommé par le président désigne les membres de son gouvernement, qu'il propose au chef de l'État. L'actuel gouvernement est entré en fonction le .
Le pouvoir judiciaire est divisé en trois ordres: judiciaire, administratif, et financier. Le Tribunal suprême de justice constitue la plus haute juridiction judiciaire du pays, le Tribunal administratif suprême étant la plus haute juridiction administrative. Tous deux statuent en cassation. Par ailleurs, le Tribunal constitutionnel veille à la conformité des lois avec la Constitution.
L'âge minimum requis pour voter est fixé à 18 ans. Les femmes ont obtenu le droit de vote en 1931 par un décret-loi (Decreto-lei 19694 de 5 de Maio de 1931), mais seulement les femmes ayant un diplôme de l'enseignement supérieur; enfin toutes les femmes obtiennent le droit de vote en 1945. La peine de mort a été abolie en 1867, la dernière exécution eut lieu en 1849.
Dirigeants actuels
Marcelo Rebelo de Sousa, candidat PSD des présidentielles de janvier 2016 est élu au premier tour avec près de 52 % des suffrages exprimés. C'est le 9 mars 2016 qu'il a pris ses fonctions à la suite d'une prestation de serment devant le parlement portugais. Marcelo Rebelo de Sousa succède ainsi au président Aníbal Cavaco Silva élu en 2006 puis réélu en 2011. Dès son arrivée à la tête de l'État portugais, Rebelo de Sousa se retrouve dans une situation de cohabitation avec un chef du gouvernement socialiste soutenu par les communistes et la gauche radicale à la suite des élections du 4 octobre 2015. Son principal rôle sera donc d'assurer la stabilité du gouvernement socialiste en fonction afin d'éviter toutes éventuelles crises politiques ainsi que le respect des engagements économiques et financiers du pays face à l'Union européenne, la Banque centrale européenne, et le Fonds monétaire international.
Le , le Parti social-démocrate (PPD/PSD) quatre ans après son retour au pouvoir semble emporter les élections législatives mais sa première place n'est due qu'à l'existence de listes communes avec le CDS (les listes communes perdent plus de 12 % des voix par rapport à 2011- 40,1 % contre 52,5 % pour le total des 2 partis) et perd donc la majorité absolue. Pour la première fois en quarante ans, un accord est conclu entre le Parti socialiste (PS) et deux autres formations se revendiquant de la gauche radicale, le Bloc de gauche (BE) et la Coalition démocratique unitaire (CDU), majoritaires en nombre de sièges à l'Assemblée de la République. Le 24 novembre suivant, malgré les réticences du chef de l'État, le secrétaire général du PS, António Costa, est désigné Premier ministre.
À la suite de l'émergence d'une majorité de gauche au parlement portugais, le socialiste Eduardo Ferro Rodrigues est élu président de l'Assemblée de la République le grâce aux voix des députés socialistes, communistes, et de la gauche radicale.
Conflits territoriaux
Deux conflits territoriaux opposent encore actuellement le Portugal et l'Espagne ; en effet, le Portugal ne reconnaît pas la municipalité d'Olivença comme territoire espagnol. À la suite du traité de Vienne, l'Espagne a manifesté la volonté de faire rétrocession de ses territoires occupés. La constitution portugaise dans son article 5, alinéa 3, rend impossible que ce territoire soit reconnu comme espagnol.
Il existe également un conflit non clarifié au sujet de la zone économique exclusive du Portugal dans les eaux territoriales des îles Selvagens (un petit archipel au nord des îles Canaries), sous autorité portugaise. L'Espagne les réclame au motif qu'elles ne se trouvent pas sur une plaque continentale distincte, en accord avec l'article 121[2] de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer. Le statut des îles Salvagens en tant que simples rochers ou au contraire en tant qu'îles est donc au cœur du débat. Ces îles constituent aujourd'hui une réserve naturelle dont les seuls résidents sont deux gardes du Parc naturel de Madère. Année après année, les autorités portugaises ont saisi des bateaux de pêche espagnols naviguant dans ces zones pour cause de pêche illégale et plusieurs survols non autorisés des forces aériennes espagnoles ont été dénoncés aux gouvernements concernés.
Indépendance et fusion
D'éphémères mouvements indépendantistes, très minoritaires, ont existé entre 1975 et 1978 aux Açores et à Madère, jusqu'à ce que ces deux archipels obtiennent le statut de région autonome. Ils sont depuis inexistants. D'autres mouvements réclament la fusion de l'Espagne et du Portugal ou encore celle de la Galice (région espagnole) et du Portugal.
Pour la fusion entre l'Espagne et le Portugal, ce sont surtout les Espagnols qui, plus que les Portugais, sont favorables à une éventuelle union entre les deux pays. Presque la moitié des Espagnols se déclarent favorable au rapprochement des deux nations alors que les Portugais sont eux un peu plus d'un quart à y être bienveillant. Un sondage public effectué en 2006 a révélé que 45,6 % des Espagnols sont pour la fusion ; parmi ceux-ci, 43,4 % défendent le nom d’Espanha pour l’hypothétique entité mais 39,4 % sont pour le nom Ibéria. Pour 80 % des partisans de l’union, ils souhaitent que la capitale soit Madrid, contre à peine 3,3 % pour Lisbonne.
Certains mouvements galiciens minoritaires et dits réintégrationnistes tels l'AGAL, revendiquent une union entre les peuples du Portugal et de Galice en militant pour ré-introduire le galicien comme dialecte de la lusophonie. D'autant que le Portugal et la Galice ont des langues issues de l'ancien galicien, le galaïco-portugais qui de fait a deux variétés modernes : le portugais et le galicien. Quelques projets transfrontaliers existent entre la Galice et le Nord du Portugal, en particulier dans le cadre de l'euro-région de Galice/Nord-Portugal (Galicia - Norte de Portugal, communidade de trabalho). Il est envisagé d'autoriser la réception des chaines de télévision portugaises en Galice, parmi les six présentes, cinq sont en langue castillane ou espagnol et une seule en galicien. Le 10 juillet 2008, le secrétaire exécutif de la CPLP a fait une déclaration dans laquelle il garantit que la Galice, n'étant pas un pays, peut toutefois prétendre à être membre associé de la CPLP, grâce à l'accord du gouvernement espagnol, et qu'il en a informé les autorités galiciennes.